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8 Juin 1996

Une interview en béton

Cette semaine, le gros pipeau toujours dans l'optique de vous informer au mieux a envoyé un de ses envoyé-spécial au siège de la firme bien connue « united injection corporation » pour entrevuer (loi toubon scuzez nous) anatole B., chef de chantier d'injection.

G.P.  Bonjour monsieur B.
B.  Salut les jeunes!!!
G.P.  Vous permettez que l'on vous appelle juste B.???
B.  Bien sûr mon gars.
G.P.  Bon commençons. Vous êtes donc affecté à l'injection des vides de carrières de la région parisienne ?
B.  En effet.
G.P.  Pouvez vous expliquer à nos lecteurs comment se passe une injection.
B.  Bien sûr. Et bien tout d'abord, on détermine par un carottage l'endroit exact où l'on va amener le tuyaux d'injection. Ensuite, on construit un mur à un bout de la galerie concernée, on patrouille dans cette galerie pour vérifier qu'il n'y a personne, puis on ferme l'autre côté de la galerie. Et enfin, on coule du ciment liquide dans le vide de carrière. Le tout prenant quand même plusieurs semaines.
G.P.  Mais vous ne risquez jamais d'emmurer quelqu'un ?
B.  Ben, vous savez : nous les ouvriers on a toujours peur de ça. Mais quand les bureaucrates disent qu'il n'y a plus personne en dessous, pour eux c'est un fait acquis. Il ne connaissent rien à la durée de vie d'un mur en bas : surtout si il gêne les gens qui s'y promène.
G.P.  En effet la démonstration en est les murs construits en 95 entre la petite ceinture et le boulevard Brune.
B.  Effectivement, c'est là un bon exemple.
G.P.  Que pensez vous du projet d'injection d'une partie des carrières situées sous le parc montsouris ???
B. ; Ce que j'en pense ? Et bien, c'est une nécessité de stabiliser le sous sol de leur projet, mais je ne vois pas l'intérêt de couler des mètres cubes de béton dans des galeries. Car, si nous on fait bien notre boulot, rien ne nous dit que ceux qui vont construire les murs le feront bien. L'injection fait appel à trop de chantier différent pour qu'elle soit efficace sur tout un réseau de galeries. Sur la longueur d'une galerie, là d'accord mais à partir du moment où il y-en a plein, ça revient à pisser dans un violon.
G.P.  Heuuu...Merci pour cette réponse éloquente. Pour conclure, vous n'auriez pas une anecdote à nous raconter ?
B.  Si, bien sûr. Vous savez que avant d'injecter, on effectue un sondage pour vérifier que la galerie est bien là où elle doit être ? Bon, et bien, un jour qu'on effectuait un sondage pour repérer une nappe phréatique, il nous est arrivé un accident curieux. Le palan avançait normalement, quand, d'un seul coup, il descend de 7 bon mètres puis, plus moyen de le faire aller plus loin. En fait, on venait de déboucher sur une galerie du métropolitain juste entre les deux voies. Mais comme on avait un peu forcé, le palan était plié. Il y-a une rame qui est passée et qui a cogné dans la tige, puis une autre est passée avant que l'on puisse prévenir la R.A.T.P. Celle-ci nous a d'ailleurs demandé des dommages et intérêt.
G.P.  Et bien merci pour cette interview, au revoir.
B.  Au revoir, et faites attention.